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 Attention : chute de Neige (Noa)

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Lun 8 Oct - 9:36

Ah, les dimanches ensoleillés. Les mésanges qui zinzinulaient sur les arbres, les frondaisons remuées par le léger souffle du vent, la lumière chaude et enveloppante de l’astre du jour qui baignait les jeunes élèves, alanguis dans l’herbe, près d’une torpeur confortable. Il y avait ceux qui dormaient, il y avait ceux qui jouaient et il y avait ceux qui avaient fait pour quelques heures une entorse et quitté la bibliothèque pour aller lire dans le parc, maigre sacrifice à l’appel général de l’oisiveté.

Neige Saint-Aven appartenait naturellement à ceux qui jouaient. Du moins fallait-il le supposer. A vrai dire, il était toujours un peu difficile, un peu délicat, de déterminer ce que Neige Saint-Aven faisait exactement, non seulement parce qu’il ne cessait de multiplier les activités, mais encore parce que les explications qu’il en donnait étaient pour le moins obscures et confuses.

Bien sûr, il y en avait qui aimaient cela. Neige était après tout un vent — une bourrasque — une tornade de fraicheur sur le monde, toujours riche en surprises. Il était aisé, pour qui aimait un peu l’imprévue et la vitalité, de se laisser charmer par le jeune homme. Et il y avait ceux qui ne l’aimaient guère et qui l’eussent volontiers enfermé dans un bloc de glace pour goûter à un peu de repos.

Ce jour-là, Saint-Aven grimpait dans les arbres. Il avait sans doute un projet très précis. Il passait de branche en branche avec agilité et son aisance témoignait assez qu’il n’en était pas à son coup d’essai. En vérité, d’escalade en crochetage de serrure, Saint-Aven avait développé toute une panoplie de compétences fort utiles pour chercher les ennuis et, très fréquemment encore, les trouver.

Il avait atteint finalement la plus haute branche — ou sinon la plus haute, du moins celle qui était à la fois la plus élevée et la plus solide. Assis à califourchon sur son perchoir, dissimulé par les feuillages, il ôta son sac à dos, fouilla à l’intérieur et extirpa bientôt une paire de jumelles de tout premier choix, qu’il régla avec une patience méticuleuse avant de les pointer vers le corps des bâtiments.

Il suffisait à présent de se repérer. Les toilettes des filles (aucun intérêt) — la bibliothèque (ennuyeux à mourir) — le bureau de la professeur d’anglais. Voilà ce qu’il cherchait. Il était temps désormais de vérifier sa théorie. Car il était persuadé que l’intéressée entretenait une relation coupable avec une bouteille de whisky cachée dans son tiroir. C’était forcé. Il lui suffisait d’être patient.

Oui mais voilà. Personne ne se présentait dans le bureau. La pièce demeurait déserte. Et Neige était là depuis… Oh, au moins cinq minutes ! Le jeune homme poussa un soupir impatient, quitta un instant ses jumelles, jeta un coup d’œil à sa montre puis reprit son observation. C’était forcé — de la patience ! Oui mais voilà : cinq nouvelles minutes étaient passées et toujours rien.

Déjà, Neige dirigeait ses jumelles ailleurs, sans but précis, observant tour à tour une élève qui vernissait ses ongles de pied dans sa chambre, un groupe de professeurs engagés dans une discussion très animée, deux garçons qui jouaient torse nu au ballon. Hmm. Voilà, ça, c’était intéressant.

Très absorbé par ce nouveau spectacle, Neige ne se rendit pas compte que son arbre commençait à s’agiter de manière bien peu naturelle et que les chênes voisins en faisaient de même. Ce ne fut que lorsqu’une pluie de feuilles s’abattit soudainement sur lui qu’il consentit à quitter ses jumelles, pour constater que sa position devenait bien précaire. En contrebas, un jeune garçon qui contrôlait les végétaux s’étaient décidés à mettre son pouvoir à l’épreuve d’un vénérable bosquet, sans songer que peut-être les arbres pouvaient être occupé par des gens qui… Se cultivaient !

Une nouvelle secousse suffit à désarçonner Neige qui entama sa chute vers le sol, passant à travers les menus branchages qui lui éraflaient le visage, et sans doute les conséquences eussent été considérables s’il n’avait eu la présence d’esprit (ou l’intuition panique, plutôt) de se téléporter brutalement, sans avoir vraiment pris la peine de décider d’un point de chute en particulier.

Donc, un instant, il était en train de se rapprocher de nombreuses fractures, l’instant suivant, il atterrissait rudement (mais beaucoup moins rudement que ce n’eût été sinon le cas) sur l’herbe, quelques dizaines de mètres plus loin, roula et heurta un objet mou d’abord non identifié, qu’il reconnut plus tard pour un être humain, de sexe masculin, d’âge voisin du sien et dont le nom était Noa.

Neige se redressa à genoux, les cheveux blancs peuplés de brindilles et parfaitement en désordre, le visage éraflé en plusieurs endroits, les vêtements un peu déchirés, le sac à dos à trois mètres de là et les jumelles cassées — bref, il apparaissait dans l’état de chaos qui lui était habituel.

Son regard se posa sur Noa. Avec un sourire un peu confus et tandis qu’il entreprenait d’ôter une à une les brindilles mêlées à sa chevelure, Neige tenta prudemment un salut :


— Tiens, euh… Bonjour. Ca va ? J’suis désolé. T’as pas trop mal ? Il fait beau, non ?

Intuitivement, il se mit à chercher une solution de repli.
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Noa Lefebvre
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Jeu 11 Oct - 11:54



    There's too much stuff around


    Aaaah… L’été en France. Les jardins verdoyants qui vous accueillent gaiement sur leurs gazons faussement sauvages, parsemés de mignonnes pâquerettes qui n’attendent que qu’on les déshabille de leurs pétales pour savoir qui des plus gracieuses filles de l’établissement nous apprécie le plus. Les Saules Pleureurs qui ne versent de larmes que de larges gouttes d’ombres qui rafraichissent agréablement les jeunes gens étouffés de chaleur. Ils se penchent sur les mares artificielles, abritant au passage les quelques carpes tachetées de rouge, et un couple de grenouille tranquille. Pas de nuages à l’horizon, juste une immense étendue de bleu azuré à perte de vue, à n’en savoir que faire, à se demander où poser les yeux. Et au milieu de tout ça, un centre du système éclatant de lumière, bon à vous brûler la rétine et à vous brûler la peau. Parfois une minuscule croix noire qui file entre les feuilles, entre les branches, et s’élève trop haut pour qu’on les suive des pupilles : un oiseau qui profite de sa liberté. Et des fois, quand on est chanceux, une coccinelle qui se pose sur la pointe de notre nez.

    Toi, Noa Lefebvre, rejoignait les jardins d’un air guilleret, tout pimpant et heureux de prendre part au regain massif de vitamine D de la journée, livre en main, sûrement quelque chose sur l’histoire des temples Incas, peu t’importait, du moment que ça se laissait lire sous un soleil de plomb. L’autre main en guise de visière, tu plisses les yeux et inspectes les environs pour choisir le coin le plus tranquille et aperçois, auprès d’un feuillu, un tronc qui n’attend que ton dos. Tu hâtes le pas : il ne faudrait pas qu’on te dérobe l’emplacement. Tout content de toi, tu t’apprêtes à savourer tes quelques heures de détente ultime en t’étalement minutieusement trois à quatre couches de crème solaire sur les bras.
    Eh oui, dur d’être albinos.
    Mais non. Tu sais bien, ç’aurait été trop facile de profiter gaiement d’une journée ensoleillé s’il n’y avait pas de péripéties à la clef. D’emmerdes qui te tombes sur le coin de la gueule. Et voilà qu’il y en a une de belle, qui se retrouve sur tes genoux, pire, la personnification des ennuis : Neige. Oh non. Pas lui. Tu as beaucoup de patience, et pourtant avec lui, elle ne fonctionne pas, il te tape sur les nerfs. Tellement, que seulement au bout de quelques minutes en sa compagnie, tu te sens monter des pulsions meurtrières et des envies d’assassinats. Tu respires un grand coup : tout doux, il s’est téléporté, il a foiré, c’est pas grave ! Du moment qu’il n’ouvre pas la bouche, ça devrait aller, hein…

    — Tiens, euh… Bonjour. Ca va ? J’suis désolé. T’as pas trop mal ? Il fait beau, non ?

    Trop de mots, trop de questions, et surtout pas dans le bon ordre. Rien à faire, il t’exaspère déjà, en moins de trente secondes d’ouverture buccale, un record.
    D’ors et déjà agacé, ton visage affiche distraitement un sourire bien plus poli que sincère et tu te contentes de virer délicatement tout le reste du corps de Neige installé sur le tien d’un coup de coude, bien loin de respirer le bonheur des retrouvailles. Tu époussettes tes vêtements du lot de feuilles qui suivirent St Aven, expires, inspires, allez, courage, tiens le coup : ne lui encastre pas tout de suite sa tête dans un tronc au hasard. Tu te décales d’un cran, augmentant un peu plus la distance entre Neige et toi, et te concentres pour que ton don n’interfère pas dans tes prochaines paroles, même si, pour dire vrai, ça te démangeait –et pas qu’un peu- de le faire roupiller pour quelques heures à la merci du soleil brûlant.

    « Oh oui, jusqu’ici ça allait. »

    Tu défroisses ton t-shirt et frottes ta cuisse : demain tu auras un bleu. Neige avait beau être léger, ça ne l’était pas encore assez pour t’éviter les jolies marques de coups qui se bousculaient sur ta peau laiteuse. Tu hausses les épaules, bah, c’est pas comme si tu avais vraiment mal, ça se voyait juste un peu trop. Tu ne daignes pas répondre à sa question, qui te paraît presque insultante : non, tu n’es pas une si petite nature pour t’offusquer d’une plume qui te tombe sur les genoux. Par contre, tu peux vite t’agacer si cette dernière reste sous ton nez.

    « Oui, temps merveilleux. Allez. »

    Du vent. Du balais.
    Oh non, ta belle éducation veut de toi que ces mots ne sortent pas de ta petite bouche. Bon, tu vas devoir le supporter jusqu’à ce qu’il se décide à déguerpir par lui-même. Ça ne devrait pas lui prendre trop de temps n’est ce pas ? Il se lasse vite non ?
    Oh pitié, que ce trait de caractère que tu lui connais si bien se manifeste vite, et que ces petites jambes le portent rapidement loin de ta petite bulle de tranquillité.




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Jeu 11 Oct - 12:47

Tout le monde adorait Neige Saint-Aven — Presque tout le monde. Il suffisait d’être un peu patient — un peu indulgent — un peu distrait — un peu calme — un peu curieux — un peu… Bref, il fallait être à peu près un saint pour supporter Neige — à moins, bien entendu, d’avoir quelque affinité avec lui, et sans doute Neige n’était-il pas le plus impopulaire des jeunes gens de Clever Cross : dans l’univers guindé de l’académie française, il apportait un vent de fraîcheur.

Et les raisons ne manquaient pas d’apprécier Saint-Aven : il était intelligent, relativement pacifique, cultivé, amical, bref, un cœur d’or. Simplement, il était tout autant capable de susciter chez ses interlocuteurs un rejet épidermique (qui parfois se tempérait avec le temps) qu’un attachement spontané et sincère et lui-même ne s’expliquait que mal les raisons qui gouvernaient à ces sentiments un peu vifs.

Il n’était pas rare que dans ses fréquents moments de mélancolie, il se reprochât sa pétulance exacerbée et, alors, il ne voyait plus que ceux qui, de toute évidence, étaient mécontents de le faire apparaître de nulle part : ces visages hantaient son marasme et il n’était que trop enclin à leur donner raison — alors il lui semblait que sa vitalité dissimulait quelque chose, une sorte d’obscurité inavouable à soi-même, et ses pensées se faisaient plus obscures encore.

Parmi ces visages inamicaux, Noa figurait indubitablement en très bonne place. Ce n’était pas le plus hostile de la galerie peut-être, mais il se défendait dans la compétition. Neige n’avait jamais pénétré les raisons qui motivaient l’animosité de son camarade ni réussi à déterminer quel aspect de sa personnalité en particulier déplaisait à ce dernier — s’il s’agissait de son pouvoir (qui mettait les nerfs de bien des gens à rude épreuve) ou bien d’une partie de son caractère.

Comme à son habitude, Neige commença ce jour-là par tenter d’aplanir les difficultés, avec une maladresse certaine sans doute, mais beaucoup de bonne volonté : il avait esquissé un sourire ni trop conquérant (pour ne pas avoir l’air fier de lui être ainsi tombé dessus), ni trop piteux (pour ne pas agacer par des signes de faiblesse), il avait posé des questions courtoises (du moins lui semblait-il) et il s’était excusé (il commençait à en avoir l’habitude).

Mais toute la politesse du sourire que Noa lui rendit ne suffît pas à en dissimuler la froideur et Neige sentit son ventre se nouer un peu, comme à chaque fois qu’il sentait se profiler à l’horizon de son existence une confrontation, petite comme importante ; il n’aimait guère les franches adversités, ni d’ailleurs les conflits larvés, et, n’eût été son sale caractère, il se fût probablement montré diplomate en toute circonstance.

Les réponses de Noa n’eurent pas de peine à confirmer les soupçons de Saint-Aven et le sourire de ce dernier se dissipa tout à fait — les grands yeux bleu-vert du jeune homme se baissèrent sur ses genoux et, d’un geste évasif, Neige entreprit d’ôter une à une les brindilles et les feuilles qui restaient encore sur son pantalon pour les poser à côté de lui, en un petit monticule, sur l’herbe.

Neige déglutit péniblement. Comme à chaque fois que Noa l’accueillait avec toute la glace dont il était capable, le jeune homme hésitait entre deux réactions : se mettre en colère et exprimer vivement (et dans un langage fleuri) ses griefs et mécontentements ou se téléporter dans un coin pour pleurer, se lamenter de tous les malheurs du monde et songer que, décidément, personne ne l’aimait (mise à part la ribambelle de bons amis qu’il croisait tous les jours).

Bien sûr, la solution la plus mûre, qui consistait tout simplement à ne pas répliquer, à ne pas se laisser affecter, à considérer que personne n’était unanimement populaire et à continuer à aller vivre sa vie un peu plus loin n’effleurait jamais le cerveau pourtant brillant de l’élève, dont l’intelligence singulière ne s’appliquait certes pas avec une égale efficacité à tous les domaines de l’existence

Assis sur ses talons, à genoux dans l’herbe, Neige restait silencieux — finalement, il prit le parti de crever l’abcès et de chercher à mieux comprendre, avec toute la délicatesse du monde, ce qui pouvait bien susciter l’animosité de son camarade. Enfin, tout du moins était-ce son projet — théorique. Il releva les yeux vers Noa.


— Non mais j’peux savoir ton problème ? Qu’est-ce que j’t’ai fait ? T’es toujours comme ça. C’est juste pour moi que tu es super désagréable ou c’est une manière générale d’être avec les autres ? Ca te tuerait d’être juste cordial ?

Bon — ce n’était pas encore tout à fait ça.
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Noa Lefebvre
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Dim 21 Oct - 15:32



    I wish you'd just go away


    Ca aurait pu être une belle journée. Une où on se glisse doucement dans ses draps, le soir, en soupirant de bonheur et en jetant un coup d’œil furtif au calendrier, pour pouvoir se rappeler du moment, et être capable de raconter gaiement ces instants à ses amis. Oui, tu aurais pu te lever demain, en grognant contre ton réveil et en pensant que tu aimerais remonter le temps, retourner t’assoir sous un arbre et profiter de la vie. Du calme. De la plénitude.
    Mais ta journée idyllique tournait peu à peu au cauchemar, un gros nuage aux cheveux blancs t’atterrissant sur la poire, et ses six phrases de trop qu’il te vomissait à la figure sans que tu n’aies rien demandé à personne. Non vraiment, c’était trop pour toi. Alors tu tentes de relativiser, de prendre une grande inspiration et de rester cool. S’énerver, c’est mal, ça ne sert à rien, surtout face à ce genre d’individus, surtout face à ce genre de …crétin. Dieu qu’il t’agace, ça te fait monter le rouge aux oreilles et le sang à la tête. Non, décidément, tu ne peux rien y faire, tu craques :

    « Mon problème ? Ce que tu m’as fait ? Réfléchis plus de trente secondes d’affilées à l’origine de cette conversation et tu risques de vaguement comprendre. En fait, je me trouve déjà particulièrement poli de ne pas t’avoir craché une certaine quantité d’insultes à partir du moment où tu m’as écrasé la cuisse. »

    L’alarme incendie. Les rires de pétasse suraigus. Les cours de mathématiques de deux heures. Les robinets qui goutent. Les bouchons dans Paris. Le tic-tac d’un réveil. Il y avait une infinité de petits détails agaçant qui tapaient sur les nerfs du commun des mortels, mais pas sur les tiens. On t’aurait cru sorti tout droit d’un temple tibétain, avec une toge pourpre et un crâne rasé luisant, à sentir l’encens à quinze kilomètres à la ronde. Toi qui ne t’énervait contre rien ni personne, toi qui ne devenait rouge que lorsqu’on te surpassait en contrôle d’histoire –et ça n’arrivait pratiquement jamais-, toi qui restait le gentil enfant poli et souriant face à toutes les situations, tu craquais, tu pétais un plomb face à Neige St Aven.
    Alors que tu aurais pu passer ta route, te lever et tracer ton chemin en faisant comme si de rien n’était, l’ignorer te paraissait au-dessus de tes forces. Non, vraiment. Trop énervant. Trop chiant. Trop. Trop trop.

    Alors au final, tu te lèves, époussettes tes genoux et balances furieusement tes bouquins dans ta boge. Autour de vous, quelques élèves commencent à s’inquiéter de la situation, te connaissant imperturbable et éternellement calme, te voilà en furie. Tu te dresses face à lui, tu dois mesurer quelques centimètres de plus, pas grand-chose, juste de quoi le toiser assez intensément pour lui faire ressentir tout ton mépris. Tu laisses échapper un ricanement. Il t’énerve tellement que même en venir aux mains ne satisferaient pas tes pulsions destructrices du moment. Tu prends ta respiration, t’apprêtes à commencer une phrase, mais les mots ne sortent pas : comment lui faire comprendre ? Comment faire rentrer dans cette foutue tête de moineau l’idée qu’il n’est que dérangement et obstacle à ta tranquillité ? Comment être assez clair, pour que plus jamais l’envie ne lui prenne de croiser ton chemin, de s’arrêter pour bavarder dans les couloirs ?
    Tu ris encore une fois. Et en bougeant tes bras comme pour mieux lui faire comprendre, tu déclares, plus cassant que jamais :

    « Ecoute… T’es… »

    Quelques secondes de plus pour choisir le mot juste. C’est bon. Tu l’as trouvé.

    « Lourd. »




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Dim 21 Oct - 16:13

Neige était relativement pacifique. Sans doute se vexait-il souvent et parfois pour peu de choses. Sans doute les sentiments étaient-ils chez lui à la fois prompts et vifs. Mais il ne se mettait pas souvent en colère et cette colère ne prenait jamais la forme d’une haine implacable, susceptible de refroidir et de devenir une aversion réfléchie et concertée. S’il savait se battre, c’était beaucoup plus pour répondre aux agressions que pour les susciter soi-même.

C’était que Neige Saint-Aven était un philosophe. Oh, certainement pas un stoïcien, qui pouvait supporter tous les aléas de l’existence sans jamais se départir d’un flegme égal et supérieur. Comme un Rousseau ou comme un Nietzsche, comme Socrate allant de fêtes en banquets, Neige aimait bouger, parcourir le monde, et c’était dans l’action qu’il trouvait les éléments de la pensée.

Alors, naturellement, il fallait être ou un peu privilégié, ou un peu persévérant, pour percer cette première fougue et se rendre compte des raisons, plus profondes que la seule nationalité, qui avaient commandé l’appartenance du jeune homme à Clever Cross — pour comprendre qu’il n’était pas simplement un électron libre presque incontrôlable mais également une intelligence de premier plan, atypique sans doute, mais redoutable. Quand elle acceptait de ne plus se cacher.

Quelque brillant et volontaire qu’il fût, Neige restait désemparé face à bien des choses et, presque tout en haut de la liste, il y avait la franche et ouverte adversité. Alors, évidemment, quand Noa répondit avec une diplomatie toute discutable à ses questions (qui, il fallait bien le reconnaître, n’étaient pas elles-mêmes de première douceur), Neige resta interdit — les yeux un peu écarquillés, comme un chaton qui vient de briser un vase, que l’on gronde, et qui n’est pas trop sûr de savoir pourquoi.

Machinalement, comme Noa se relevait, Neige se releva aussi. Et il eût de beaucoup préféré que son fort peu aimable camarade s’en tînt à ses premiers reproches plutôt que de se livrer à une démonstration de mépris — bon, il avait insulté son intelligence, c’était une chose, mais était-ce bien nécessaire de se livrer à un tel étalage de condescendance ? Neige avait un peu l’impression d’être la victime d’une cruauté en partie gratuite.

Tout du moins, peu justifiée. Sans doute la chose l’eût-elle moins perturbé s’il n’avait pertinemment su qu’un pareil comportement était loin, très loin de ce à quoi Noa était habitué. Force lui était de constater que le jeune homme lui réservait un traitement très spécial et Neige se sentait d’autant plus humilié de susciter la colère de celui qui ne s’énervait jamais. Il fallait vraiment qu’il fût insupportable.

Instinctivement, le jeune homme recula d’un pas. En d’autres circonstances, sans doute se fût-il porté à la hauteur de l’animosité de Noa, mais la froide détestation dont ce dernier faisait preuve ôtait au bénévole Saint-Aven la plupart de ses ressources. Alors il baissait piteusement la tête, en songeant malgré lui qu’il devait bien avoir un peu mérité tout cela — et qu’il devait être le dernier des idiots pour être traité de la sorte par Saint Noa.

D’une voix calme et inhabituellement posée, Neige lâcha finalement :

— Ah.

Il déglutit péniblement. Priorité numéro un : ne pas pleurer. S’il pleurait, son humiliation serait vraiment totale et il n’oserait plus jamais sortir de sa chambre d’internat. Du bout de la basket, il retournait machinalement un morceau de terre. De son ton triste et découragé il reprit :

— C’était peut-être pas nécessaire de… Dire ça comme ça. Mais enfin… Si c’est comme ça que… Tu l’sens.

Les yeux toujours fixés au sol, le jeune homme sentait néanmoins peser sur lui les regards des quelques élèves qui avaient posé leurs yeux sur lui, pour assister à l’algarade. On n’était guère habitué, à Clever Cross, à voir Neige être si rapidement réduit au silence.

— Je vais… Désolé pour ton…

Le jeune homme haussa évasivement les épaules avant de s’évader plus littéralement encore — disparaissant brusquement, pour réapparaitre une vingtaine de mètres plus loin, près d’un arbre, au pied duquel il s’assit. Là, au moins, personne ne pourrait plus l’observer. Il pourrait prétendre faire la sieste, tandis qu’il éviterait en vérité de songer qu’il devait être détestable pour être ainsi détesté — c’était un peu comme essayer de ne pas penser à quelque chose et donc d’y penser tout le temps.

Et bien sûr, il fallait surtout ne pas pleurer. Parce qu’il était un garçon tout de même. Il n’allait pas se laisser abattre par le premier individu venu qui avait décidé de l’insulter. Cela arrivait à tout le monde tous les jours. Bon, peut-être pas. Mais tout de même. Il n’allait pas pleurer.

Ou alors, pas beaucoup.
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Noa Lefebvre
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Jeu 25 Oct - 21:09



    Oh Baby, don't you cry.


    Bon. D’accord. Tu y avais peut-être été un peu fort.
    Voilà les pensées qui montaient en crescendo dans ton esprit, au fur et à mesure que le visage de Neige se décomposait : tu ne l’avais jamais pensé si faible. Et le voilà qui te faisait passer pour le méchant, le pire des enfoirés qui martyrise les jeunes enfants comme lui, une place qui ne t’allait pas vraiment : à la base, tu étais supposé être quelqu’un de gentil, quelqu’un qui sourit tout le temps. Mais on n’a jamais dit que tu te préoccupais bienveillamment des autres ! Tu préférais écouter les gens plus par plaisir de leur soutirer leurs petits secrets et leurs hontes cachées que par intense envie de les aider à se sentir mieux. Voilà la triste vérité.
    Mais vicieux, cruel, et sans cœur, tu ne l’étais pas au point de te mettre à rire au nez de Neige qui blanchissait comme un drap devant ta remarque que tu avais cru –à tort- sans conséquence. Dans tes scénarios, tu l’aurais plutôt vu en train de s’énerver encore plus, en train de t’en coller une, vexé, ou peut-être en te crachant quelques insultes à la gueule. Mais jamais, ô grand jamais, ne l’aurais tu imaginé au bord des larmes. Et muet comme une carpe. Les secondes de silence te semblent durer des heures, et le soulagement qui aurait dû occuper ton cœur en le voyant comprendre tes paroles se muent lentement en culpabilité qui le rend lourd. Et quand Neige se décide à nouveau à ouvrir la bouche, ce n’est que pour te conforter dans ton idée : tu as été trop loin. Ce type est un môme. Il s’excite, cherche un peu la bagarre, et puis au final, retombe plus vite que la lumière. Un enfant qui joue à la guerre, mais part chialer dès qu’on lui fait un peu mal.

    Ses mots te font un peu mal au cœur, tu te retrouves à te sentir mal à l’aise, à regarder ailleurs, et voir le regard des gens qui pèsent lourd sur ta conscience : t’es fier de toi ? T’as fait pleurer un gamin ! Et le voilà qui se téléporte vingt mètres plus loin. Sous un arbre, toujours sous ton champ de vision. Bon. Si ce n’est pas un appel à la consolation, tu ne sais pas ce que c’est. Soupirant un grand coup, te grattant le nuque, tu ne comptes pas t’excuser, juste lui remonter le moral. Peut-être lui proposer un mouchoir. Oh, merde, Neige. C’est pas du jeu. Lui il a le droit de te faire des reproches, de te hurler dessus, mais quand viennent les tiennes, tu passes pour un monstre, à lui balancer à la figure la simple vérité. Mais si c’est pour qu’il réagisse comme ça, si c’est pour lui causer tant de tracas, tu préfères encore la taire, la vérité.
    Tu te mets en marche vers le jeune garçon, soupirant bruyamment à chaque pas que tu fais, te demandant quoi dire, que faire pour l’empêcher de se mettre dans tous ses états juste parce qu’une seule des personnes de ce monde ne croule pas sous son mignon minois. Vingt mètres, c’est court, et tu n’as pas vraiment un temps de réflexion très long lorsque tu te présentes devant lui :

    « Bon, j’admets, j’y suis allé un peu fort. »

    Pas de réaction. Un reniflement. Bon. Il va falloir se montrer plus chaleureux que ça.
    Tu ouvres ton sac bien ordonné, diriges savamment tes doigts vers une poche et en tires un paquet de mouchoirs de bonne marque. Tu arraches la languette bleue sans faire exprès, t’agaces quelques secondes sur l’emballage et finis par brandir fièrement un mouchoir bien plié entre tes doigts. Tu t’assois doucement à ses côtés, poses l’objet de tes recherches sur ses genoux, et passes une main dans ses beaux cheveux blancs. Tout autant que les tiens. Ça vous fait au moins un point en commun.

    « Ce n’est pas forcément très grave, qu’on ne s’entende pas. Pas besoin de te mettre dans des états pareils. D’accord ? »

    Soit. Tu ne l’apprécies pas. Mais ce n’est pas comme si le voir pleurer t’emplissait de bonheur. Alors à ta façon, et sans décoller ta main de ses cheveux, tu essayes de le consoler. Même si tu n’es pas très fort, à ça.




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Jeu 25 Oct - 22:42

A vrai dire, Neige se fût très volontiers téléporté beaucoup plus loin, hélas son pouvoir n’était pas toujours aussi docile qu’il pouvait le souhaiter, et la fatigue nerveuse que les propos de Noa avaient jeté si soudainement sur son esprit l’empêchait de contrôler aussi exactement qu’il l’eût voulu son transport — il s’était éloigné autant qu’il l’avait pu, mais il lui fallait désormais recouvré un peu de présence d’esprit pour envisager une fuite plus ordonnée.

Or, contrôler ses émotions n’était pas exactement son grand domaine de spécialité. Si Neige faisait preuve dans certaines circonstances d’une maturité extraordinaire et d’une capacité de raisonnement à couper le souffle, dans les menues épreuves de la vie, ses réactions étaient pour le moins vives et imprévisibles, et les émotions qui fleurissaient sur sa peau avaient de quoi déconcerter ses interlocuteurs même les plus avertis.

C’était que, comme beaucoup d’esprits un peu trop brillants, le talent de Neige pour vivre paisiblement en société était inversement proportionnelle à sa puissance de réflexion créative, ce qui impliquait souvent que l’on n’était plus guère capable de déterminer si l’on avait affaire à un esprit de premier ordre ou à un enfant fragile qui découvrait le mode. Très probablement beaucoup des deux.

Il essayait donc de ne pas pleurer : c’était à cela qu’il en était réduit, par fierté, par sens un peu idiot de ce qu’il se devait en tant que garçon et puis surtout parce qu’il avait peur, s’il commençait, de ne pas pouvoir s’arrêter. Il se sentait blessé — ce n’était pas exactement une rancune, il n’était pas à proprement parler vexé, mais très exactement blessé comme un animal, comme un félin qu’une plaie fait soudainement prendre conscience de son essentielle fragilité.

Neige, bien sûr, tentait de comprendre l’origine de son trouble. Alors, il repassait dans son esprit les propos de Noa, les détails de la scène qui venaient de se produire sous ses yeux ridiculement effarés, il ressentait aussitôt à nouveau toute la honte de son humiliation et la peine, bien plus profonde, d’un rejet qui lui semblait dépasser de très loin la simple absence d’atomes crochus, et ses capacités de réflexion étaient paralysées, sans qu’il pût progresser.

Il en était donc à peu près au même point quand Noa surgit près de lui. Bon, s’approcha très lentement, mais dans l’état où Neige, cela relevait sans aucun doute du surgissement. Presque instinctivement, le jeune homme se recroquevilla un peu plus sur lui-même — très légèrement, en ramenant ses genoux contre lui, mais tout de même, c’était comme un réflexe de défense, comme s’il s’était attendu à ce que Noa le poursuivît de son ire.

Alors, bien entendu, il eut un peu de mal à comprendre immédiatement ce qu’on lui disait. Un reniflement dubitatif fut sa seule réponse d’abord, puis il releva de grands yeux vert-bleu humides vers son interlocuteur. Le regard se fit un peu plus interrogatif en suivant les savantes manipulations de Noa — un paquet de mouchoirs — bon : c’était définitivement la honte, comme disaient les jeunes. Noa s’était aperçu qu’il pleurait. Peut-être qu’il venait le narguer ?

Mais alors, il le narguait avec beaucoup de douceur. Le rose monta aussitôt aux joues de Neige quand la main de son camarade se glissa dans les cheveux — il ne songea pas à l’en empêcher, à la fois parce que la caresse n’avait rien de déplaisante et parce qu’il était un peu trop désarçonné pour réagir. C’était ce qui s’appelait l’art de la douche écossaise : la seconde d’avant, Noa le couvrait d’insultes, la seconde suivante, il lui offrait les témoignages d’une étroite affection.

D’une voix timide et calme, Neige souffla :

— Merci…

Il resta embarrassé quelques secondes, puis reprit dans un murmure :

— Y a un fossé entre pas s’entendre et puis… ça.

Nouvelle montée de larmes. Neige ferma les yeux, les contint, inspira profondément, rouvrit les yeux. Il était bien décidé à se comporter comme un adulte — la tristesse avait sur lui au moins cet effet bénéfique qu’elle calmait son hyperactivité et l’autorisait à dévoiler les aspects les plus subtils de son caractère.

— Mais j’suis désolé. J’voulais pas… Pleurer comme un idiot. C’pas très délicat d’imposer sa tristesse aux gens. Les forcer à exprimer une compassion qui est exigée plutôt par la société que par leur cœur.

Il y avait un monde entre ces déclarations de politesse qui relevaient presque des arcanes salonnières du dix-septième siècle et son arrivée tonitruante.

— Je suis désolé si… Comment dire ? Tu m’trouves désagréable. A ce point là. J’suis un peu habitué à c’qu’on me crie dessus, mais toi, c’est différent. Toi, tu es plutôt… Je ne sais pas. Gentil. Ca a l’air un peu bête, comme mot, j’suppose. Mais c’est bien. Je veux dire, c’est une belle, une rare qualité. Bref. Tu vois, irriter la gentillesse, c’est comme blesser l’innocence : on se sent abject.

A peine avait-il reçu le mouchoir que Neige avait pudiquement détourné les yeux, incapable de vraiment affronter le regard de son camarade. Mais, finalement, il les reposa sur Noa et conclut avec un pâle sourire d’excuses :

— J’sais pas pourquoi j’t’embête encore avec ça. T’es pas obligé d’rester, tu sais. Les autres vont pas croire que t’es un salaud pour m’avoir crié dessus.
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Noa Lefebvre
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Mar 30 Oct - 14:03



    La main toujours plongée dans ses cheveux neige, le regard accroché au loin, sûrement à un rosier au hasard, mais l’oreille bien tendue et attentive à ses plaintes, tu l’écoutes silencieusement, profitant des quelques secondes de calme pour reprendre un contrôle impeccable de ton don. Il ne faudrait pas que tu l’endormes en voulant lui expliquant clairement que ne pas être aimé d’une personne, ce n’est ni un drame, ni la fin du monde. Tu acquiesces à ses propos : Soit. C’est vrai. Il y a une grande différence entre ne pas s’entendre avec une personne, et péter un plomb face à elle. Mais qu’est-ce qu’il voulait que tu lui dises ? « Salut, je te déteste, barre toi » ? Remarque, ça aurait pu être plus diplomatique que le venin que tu lui avais balancé à chacune de tes phrases précédentes. Tu regrettais un peu. Ce bal, cet enchaînement d’événements bizarres, ça te mettait d’une drôle d’humeur : toujours un peu trop tendu, toujours un peu trop sur les nerfs. Comme si une tuile allait te tomber sur le coin de la gueule d’un instant à l’autre. C’était ton instinct, et il te trompait peu. Alors tu restais sur tes gardes, quitte à larguer sur une aire d’autoroute une certaine partie de ta pseudo sympathie.

    Il s’excuse de pleurer. Tu soupires. Tu caresses ses cheveux un peu plus fort en priant pour que ça suffise, et que tu n’aies pas à l’enrouler de tes bras pour faire cesser ses pleurs. Ce n’était pas vraiment ton genre. Tu donnais les accolades, les poignées de mains, les bises du matin, du soir, mais pour le reste, tu ne savais pas trop t’y prendre.
    Et il s’excuse encore, en déblatérant le discours le plus idiot que tu n’avais jamais entendu :

    Toi ? Gentil ?

    C’est mal, tu le sais, mais tu ne peux réprimer l’énorme fou rire naissant dans ton ventre. En entendant ces mots, tu ne peux t’empêcher de rire, pas trop fort, pas trop bruyamment, mais c’est normal : tu tentes désespérément d’étouffer tes rires, collant ta paume libre sur ta bouche, les yeux plissés comme un chinois et les larmes montantes. Qu’est-ce qu’il en dit, des bêtises, ce pauvre Neige. Et te voilà achevé par ses suppositions sur le motif de ta venue près de lui : toi, ici pour que les autres ne voient pas en toi un salaud ?
    Tu te demandes d’où Neige tire-t-il ces conclusions plus fausses les unes que les autres. Gentil ? Qui est gentil ici ? Toi, tu es poli. Mais loin de toi l’idée de la gentillesse à l’état pur. Tu peux l’être c’est vrai, mais… en être une figure ? Neige s’est planté de personne. Quant à ce que le reste du monde pense de toi… ça te fait autant d’effet qu’une nouvelle marque de lessive pour laver tes vêtements : tu t’en balances. Soit. Ça t’arrange de paraître sympathique, propre sur toi et sage pour tous les avantages que ça t’apporte. Mais c’est tout.

    Qu’ils te cassent du sucre sur le dos, qu’ils te trouvent bête, moche, plat ou inintéressant, c’est leur problème, pas le tien, pas de quoi t’en soucier. Et Neige se trompait tellement sur ton compte que tu t’attendrissais devant lui. Alors c’est donc comme ça qu’il te voyait ? Un léger rire s’échappe à nouveau de tes lèvres, tu retires ta main de ses cheveux, soupires un grand coup et réponds :


    « Neige. Vraiment, je ne sais pas d’où tu tiens tes infos, mais, change de source, au plus vite. »

    Oups. Sympa, on avait dit sympa, compréhensif et surtout pas méchant ou sarcastique :


    « Je ne suis pas si gentil que ça, d’accord ? Et les autres peuvent bien me voir comme un salaud, ça m’importe peu. Je ne suis pas venu m’asseoir à côté de toi pour leur faire plaisir. Ecoute, c’est vrai, je me suis emporté, je m’en veux, j’ai les nerfs à fleur de peau en ce moment, d’accord ? »

    Se reprendre. Oui, c’est mieux comme ça. Alors tu lui tends une main amicale, polie, une fois de plus, et affichant le plus grand de tes sourires. Allez. Pour éviter que l’enfant pleure. Pour lui coller un sourire sur le visage. Tu risques quoi après tout ? Tu ne le verras pas plus qu’avant. Alors autant le rassurer un peu. Ça ne changera pas vraiment l’opinion que tu as de lui, mais ça séchera ses larmes.

    Parce que même si tu n’es pas vraiment gentil, tu es loin d’être méchant.


    « On reprend à zéro, si tu veux. »



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