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 Bufalo Marinus - Aurelian

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May Bastide
May Bastide
Autonomia


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Lun 20 Aoû - 10:46

Bufalo Marinus


Les genoux tremblotants, la vue un peu floue, je m’extirpe de la foule étouffante tant bien que mal. Je jette un regard derrière moi, plisse les yeux, tente de distinguer un visage dans le noir, des traits connus. Malgré le voile opaque qui m’habille l’iris, je cherche ce que je trouve, le regard aimanté, attiré, je dois avoir un radar à Léo. Le sourire m’étire les lèvres quand je l’aperçois en train de se frotter à un Allemand quelconque, ou peut-être un Russe, pas d’ici, dans tous les cas ! C’est bien, ça calmera sa libido pour les quelques jours à venir, ça me fera des vacances. Je tourne le dos à la piste de danse, aux corps qui s’entrechoquent, au brasier d’hormones et je taille la route, empoignant au passage une bouteille douteuse sur le buffet. J’en croise quelques-uns qui se lèchent, d’autres qui finissent tête dans les toilettes, ou la tête ailleurs, moi je veux la mienne dans les nuages. Je dépasse le terrain des hostilités, enfonce la porte avec mon épaule : même pas mal. Sûrement que je ferai moins ma maligne demain, avec un bleu gros comme une orange sur le bras, mais on n’y est pas, à demain.

Pas que je n’apprécie pas ce genre de fête ! Au contraire, ça me plaît, c’est plutôt drôle de voir un premier de la classe noyer tout son stress et son anxiété stockée pendant l’année dans un verre de gin et un morceau d’électro. C’est marrant de s’asseoir sur une chaise, et de contempler la débauche de la jeunesse, les cerveaux qui se désactivent, les raisons mises au placard et notre nature animale qui reprend le dessus. Je les vois se secouer dans tous les sens à s’en rendre malade, se piquer dans un coin un peu plus sombre que les autres, se dévorer du regard, se dévorer tout court, je les vois transpirer ensemble, se consumer ensemble, perdre leur identité au nom de la danse, se cramer la peau à trop se caresser, et s’empoisonner de l’intérieur pour être celui qui se sentira le mieux. C’est aussi beau qu’effrayant, et quand j’ai trop peur, je quitte ma chaise et je pars les imiter toute seule, dehors, là où personne ne pourra contempler ma débauche à moi.
Un peu essoufflée, je lâche négligemment la porte qui part s’exploser dans un vacarme étouffé par la musique, personne ne remarquera mon absence, et ce n’est pas si grave que ça. Je bénis Erika de m’avoir obligé à porter cette petite robe bleue si légère, j’enlève mon élastique, laissant mes mèches virevolter au gré du vent et je respire à pleins poumons. Les nuits d’été françaises sont bonnes à nous enivrer de douceur, je reste là, les bras écartés, paupières closes, en me disant une seconde, encore une seconde à profiter de cet air frais qui m’enveloppe et me rend les idées claires. Le sourire jusqu’aux oreilles, je me décide enfin à m’éloigner de ce bordel infernal et de ce bruit qui me ronge les tympans, je ne me préoccupe pas d’où je file, et je cours à l’aveuglette, manquant plusieurs fois de m’esclaffer par terre, et de dégringoler en bas d’un talus. Et puis j’explose de rire, je tournoie, je me dis que l’alcool c’est le mal, et j’en rebois une gorgée. Je ne lâche pas la bouteille, comme si c’était une question de vie ou de mort, je la garde et la vide à moitié, et puis tout d’un coup me voilà qui débouche dans les jardins, des jardins immenses, beaux à tomber par terre. D’ailleurs je me laisse tomber, sur les genoux, bouche bée devant le ciel qui brille et se la pète, en échappant un :


« WOUAAAAAH ! »

Et je m’étale sur le dos, je massacre ma robe en faisant un ange dans les graviers, je me relève, et pas si loin que ça, je vois un dos familier. Une carrure que j’ai déjà vu. Une connaissance d’un soir, un copain de bouteille, oui, je crois bien que c’est lui. De larges épaules, quatre têtes de plus que moi, des mèches brunes qui lui tombent sur la nuque et de la fumée qui s’échappe de ses lèvres. Pas de doute. C’est Aurelian.
Elève de Virtus Insania, le nid de psychorigides, j’avais cru tomber sur quelqu’un de sérieux, et puis à en juger les petits points sur son coude et ses pupilles aux diamètres anormaux j’avais vite compris. Mais je m’en foutais, moi je voulais juste discuter avec quelqu’un, et j’avais eu assez de chance pour tomber sur quelqu’un d’aussi intéressant qu’Aurelian. A pas de loup, je m’approche de lui, aussi silencieuse qu’un chat, mais pas comme Boris, parce que Boris est gros. A quelques centimètres, je me penche au-dessus de lui pour lui faire face, tête à l’envers :


« Bouh ! »

S’il avait le hoquet, il ne l’aurait plus maintenant. Je rigole une fois de plus, je pose genou à terre et je roule à ses côtés pour m’asseoir n’importe comment. Je rebouche la bouteille et la laisse choir entre nous deux, à présent « bien commun », bonne à partager pour délier les langues et approfondir les bavardages. Je le regarde, et je le trouve beau, écrasant de charisme, un peu effrayant peut-être. Moi je ne suis rien à côté.


« Tu te souviens de moi ? Tu sais, May ? »

Quel intérêt de retenir ma tête quand on a celle d’Aurelian ? Je suis quoi moi, à côté, un têtard ? Non, moins. Non, pire. Le plus laid des têtards, le plus faible, et le plus inutile. Un Bufalo Marinus à côté d’un Tigre du Bengale.




Dernière édition par May Bastide le Mer 29 Aoû - 20:28, édité 1 fois
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Aurelian L. Kieser
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Sam 25 Aoû - 2:01


…And I’m down for the night


Une soirée comme ça. Une autre, genre la millième au moins. Y’avait quelque chose d’étrange à s’être accommodé à ce mode de vie. Ça devient une routine. Une routine qui n’est jamais vraiment routinière. C’est toujours le même processus, avec Niko. On passe deux bonnes heures à se préparer; déjà, rien que la douche, ça prend quarante-cinq minutes. Non seulement on aime bien prendre notre temps, mais c’est qu’on est plutôt incorrigibles quand ça vient à prendre une douche à deux. La chaleur, l’eau, le contact… Et puis après, on met de la musique beaucoup trop fort, on sniffe quelques rails, on s’embrasse puis on choisit nos fringues. C’est un jeu. Les vêtements volent un peu partout, les rires fusent régulièrement. Combinaisons ratées, passe-moi ce jean, j’préfère l’autre t-shirt. Et au final, on réussit à s’habiller, même si on a passé la moitié d’une bouteille de vodka au goulot dans le processus. J’essaie de me coiffer, il n’arrête pas de passer ses doigts dans mes cheveux quand j’arrive à quelque chose. Et bien entendu, monsieur me menace des pires tortures si j’ose lui rendre son geste. Alors je passe derrière lui, mes bras enlacent sa taille, mes mains passent sous le tissu de son t-shirt et j’embrasse sa nuque, pendant qu’il fait autre chose. Et évidemment, il essaie de me repousser. Et évidemment, ça échoue. Il sait bien que je suis tenace. Après quelques mots susurrés à l’oreille et quelques gorgées volées à la bouteille de vodka, on quitte finalement la chambre. Fallait bien en sortir un jour.

Et la soirée se passe comme prévu. Quelques shots pour commencer, on se refile nos speeds et nos ecstasys puis on va danser. La musique nous enivre, autant que le contact. Je le tiens contre moi, guide la danse au puissant rythme électro qui fait trembler nos cages thoraciques à l’unisson. Mes lèvres effleurent son oreille, le piercing de métal sur ma langue vient titiller son lobe. Il se tourne et m’embrasse pour me faire arrêter. Les gens nous regardent, nous envient, et nous on s’en fiche bien. On s’a. Il est à moi, et je suis à lui, et c’est tout ce qui compte. Ses lèvres gourmandes ne lâchent pas les miennes, alors que je regarde du coin de l’œil le petit auditoire qui nous observe. Je ne retiens pas un sourire avant d’écarter ma bouche de celle de mon amant. Les minutes passent, puis les heures, les verres, les rires et les baisers. J’ai envie d’être seul avec Nikolaï, alors je l’agrippe par la taille et je lui suggère de sortir prendre l’air, peut-être fumer un joint. Il accepte d’un hochement de tête puis nous sortons. La brise froide nous étreint bien vite, nous arrache des frissons. Je remonte un peu la fermeture éclair de ma veste dans mon cou et j’allume le joint. On s’assied à même le sol et on discute, le dos contre la pierre de l’établissement, la musique se faisant entendre, assourdie mais tout de même claire. Mais je sais qu’il y a quelque chose. Je l’entends dans sa voix. Je l’interroge sans gêne, sourcil haussé, regard soucieux, et il me répond à moitié. Il est fatigué, qu’il dit. Mais j’insiste, parce que je le connais et que je sais qu’il y a plus que ça. Il a la mine pâle, les yeux embrumés d’autre chose que de l’alcool. Puis il m’avoue finalement qu’il ne se sent pas dans son assiette. Je me sais incapable de m’endormir pour l’instant, alors je lui suggère d’aller se reposer pendant que je reste dehors à faire mes trucs habituels de dessin et d’écriture, le temps que je m’épuise un peu. Je le rassure; ça va, je risque pas de rentrer trop tard, va te reposer. Après quelques tentatives de sa part, quelques répliques de la mienne, il capitule, m’embrasse tendrement puis se lève en me faisant promettre de lui faire un bisou quand j’allais venir le rejoindre au lit. Il est adorable. J’hoche la tête, lui dit que je l’aime, puis il s’en va. Je ne sais même pas pourquoi il a essayé de me le cacher. Il sait que je finis toujours par tout savoir.

Je finis par me lever. Parce que parfois, j’ai envie d’être loin du monde, j’ai envie d’être seul, de ne plus entendre cette musique qui tapisse presque toutes mes nuits. Et puis les maux de tête refont surface. Je peux encore faire avec, ça n’a rien comme les migraines que j’ai déjà connues, mais c’est suffisant pour être désagréable. J’ai besoin de relâcher un peu de tension. Écrire, dessiner. Sortant une cigarette de mon pack et la fixant au coin de mes lèvres, je me mets en marche vers les jardins. C’est le petit sanctuaire que j’ai trouvé ici. Au beau milieu de la nuit, il n’y a personne pour déranger un élan d’inspiration, ou encore un élan de passion. J’allume la clope, je souris en pensant à nos retrouvailles, qui étaient juste là aussi. C’était probablement l’un des plus beaux jours de ma vie. Je m’assieds dans l’herbe, la Loire à mes pieds, et je tire un bon coup sur la clope avant de laisser la fumée claire d’échapper d’entre mes lèvres. Je sors mon carnet de ma poche, mon crayon de plomb, et sans y penser vraiment, je me mets à écrire. De tout, de rien. Des mots qui me reviennent souvent, des phrases, des évènements, des dates, des chiffres. Et je dessine. Des paysages, des gens, des plantes, des endroits. J’oublie le temps qui passe, où je suis.

Jusqu’à ce qu’un flot de cheveux bleus se rabatte devant moi et que deux grands yeux me fixent, enjoués. Je sursaute violemment, en échappant mon matériel sur le sol, puis lâche un rire nerveux en remarquant de qui il s’agit et en la sentant s’asseoir à côté de moi. May de son prénom, son nom, elle ne me l’a jamais dit. Une gentille fille, jolie, amusante, candide. Elle a des branchies; elles sont apparues à notre deuxième rencontre, dans un éclat de rire trop sincère. Ça m’avait franchement surpris, mais je n’en ai pas fait de cas, c’est pas le genre de choses qui me dérangent dans la vie. Ça m’a pas empêché de lui faire la bise ou de la serrer. Je referme mon carnet et la salue d’un sourire mince avant d’éteindre le mégot de ma cigarette et de sortir un joint, à présent, de mon paquet. Je l’allume, presque nonchalant, et en tire la première taffe avant de le tendre vers May.


    « Et toi tu ne te souviens pas de la nature de mon don? Bien sûr que je me souviens de toi. »


Je me tourne vers la bouteille qu’elle a posée entre nous deux, en observe l’étiquette puis je la débouche, la portant à mes lèvres. Une, deux, trois bonnes gorgées. Je la referme, la pose au sol, puis fixe mon regard olive dans celui de May.

    « Quoi de neuf dans ton monde, princesse? »


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May Bastide
May Bastide
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Dim 26 Aoû - 22:33

Il ne faut pas m’en vouloir, si Aurelian me tape la causette en soirée, et que j’oublie un peu plus de cinquante pour cent du contenu de la conversation. La raison est principalement dans le contexte : nous sommes en soirée. Ce qui sous-entend que je n’ai pas bu que du jus d’orange, ce qui suppose que j’ai avalé autre chose, quelque chose qu’on décrit en degrés, en prenant un accent russe et en s’arrachant la gorge. Or, je suis une fille. Une petite nature, de faible constitution, oh, pauvre moi-même, je m’auto fais pitié, à voir trouble au bout de deux gobelets. Triste destinée ! Condamnée à vomir au bout de trois shots, anatomiquement exclue du monde de la nuit, au risque d’y passer à la première piqûre de je ne sais quoi.
Mais ce n’est pas pour ça que je me prive de l’effleurer du bout des doigts, d’y goûter de la pointe de la langue, juste pour voir, juste pour sentir, par curiosité. Et quand j’ai fini, quand je m’y suis frottée, quand je m’y suis brûlée, je m’échappe dans les bras de la nuit, comme ce soir, l’euphorie dans le sang, et je déverse ma stupidité accentuée par les breuvages et les fumées sur le malheureux premier venu.
Trois fois, qu’il est le malheureux premier venu, Aurelian.
Et je me demande comment il a fait pour me supporter dans un état pareil ! Je n’imagine même pas le nombre de fois où il a du vouloir m’encastrer la tête dans un mur, me balancer dans la rivière ou me faire bouffer de l’herbe. Et pourtant il ne l’a jamais fait, du moins pas encore, je crois que je devrais m’en montrer reconnaissante.

Alors c’est vrai que j’avais oublié son don, mais il me revient bien vite au bout de trois mots de sa bouche : évidemment, qu’il ne m’a pas oublié. Même s’il le voulait, il ne le pourrait pas. Pris au piège par des souvenirs précis comme des films, emprisonnés par des centaines de visages trop nets, victime d’une mémoire sélective qui ne fait pas son taf : le don d’Aurelian était du domaine du maudit. A se rappeler de tout, à ne rien oublier, de quoi vous rendre fou, de quoi vous faire péter un câble, un don insupportable que tout le monde croit génial mais que moi je vois toxique. Un pouvoir bon à vous ronger de l’intérieur, à hanter vos nuits et à vous pourrir la vie et pourtant Aurelian se tenait là, fort, imposant, écrasant, bien loin de flancher, bien loin de faiblir. Et c’est ce qui me passionnait chez lui.
Quand je m’en souvenais.

« Pardonne ma mémoire de poisson rouge, c’est sûrement un effet secondaire des branchies ! Et puis ça, ça n’arrange pas mon affaire ! »

Et je lui désigne la bouteille du doigt, en souriant bêtement comme une ado en chaleur qui rencontre son idole. Fascinant, Aurelian, captivant et envoûtant, quand il vous bouffe de ses splendides yeux olives et vous perce l’âme de son regard si charmant. Cruel, Aurelian, blessant et dévastateur lorsqu’on se rend compte que ces iris qui vous couvrent n’en ont strictement rien à foutre de vous, n’ont aucune belle arrière-pensée à votre égard, ne sont destinés qu’à un seul être. Et je me demande combien d’autres a-t-il écrasé du talon, en leur tournant le dos sans un regard en arrière ? Combien de fille ? Combien de garçons ? Combien s’y sont laissés prendre ? Dans cette toile qu’Aurelian tisse, une araignée qui n’a pas faim, ou faim que d’une personne. Qui capture et laisse mourir ses proies sans y toucher, l’air de rien. Cette présence qui vous étouffe mais qui vous attire : un monstre de charisme.
Alors je le contemple bouche bée, comme si j’observais un tableau ou une statue, comme s’il était trop impressionnant pour être réel. Quand il me tend le joint, je le remercie d’un sourire discret en frottant ma joue contre son épaule, mais je la décolle aussitôt pour tirer sur son présent, la fumée dans la gorge et le cancer imminent dans les poumons. Je voudrais faire des ronds de fumées, mais ça ne marche pas, et c’est plutôt laid ; je gagne juste des yeux qui piquent et qui pleurent et un gros fou rire face à ma désespérante maladresse. Je lui vole une autre taffe, et je lui rends son herbe qui me fait voir deux fois plus d’étoiles qu’il n’y en a dans ce ciel :

« De neuf ? Hm… Un paquet de trucs ! Votre débarquement chamboule nos petites vies du cliché de l’élève Français, c’est dingue. Je suis un peu déçue, je n’ai rencontré ni Russe, ni Allemand, enfin si, à part toi, mais toi, tu comptes pas. Par contre j’ai rencontré deux anglais ! Un de la même école que toi, Raven qu’il s’appelle. Un cœur qui parle aux pigeons ! Et ma chère et tendre colocataire, Lyria ! C’est une garce, une vraie de vraie, j’en avais jamais rencontré des pareils avant. Et je m’en serais passée. Elle m’a bouzillé un CD de The Killers, t’imagines ? Quel genre de personne n’aime pas les Killers ? Hein ? OH PUTAIN, UNE ETOILE FILANTE ! »


Je me redresse subitement et me dévisse le cou pour suivre la chute en arc de cercle du météoroïde, admirant avec entrain le plasma qui strie les cieux. Pour une seconde, juste une, je me demande si je ne l’ai pas rêvé, mais dans le doute, je formule mon vœux tout de même, en fronçant très fort des sourcils et en serrant des poings pour qu’il se réalise. Un vœux stupide, un vœux idiot, tellement que je n’ose le citer. Je me retourne vers Aurelian, les yeux pleins d’étoiles ; j’espère qu’il l’a vu aussi, comme ça son souhait pourrait se réaliser avec le mien !

« Tu l’as vu, dis ? Aurelian ? »

Je retombe sur mes fesses, déjà fatiguée de mon propre manège, puis la paresse me gagne, et m’engourdit tout le corps. Je roule dans sa direction, finissant de tâcher et mettre en charpies la robe si minutieusement choisie par Erika, et me hisse mollement jusqu’à son épaule où je laisse mon front s’écraser. Paupières closes, monde flou, je m’autorise à fouiner là où ça ne me regarde pas :

« Aurelian, tu y vas avec qui, au bal ? »

Et j’enfouis mon visage dans son t-shirt, pour échapper au sien. Pour me protéger de ses yeux de Don Juan, et profiter d’un peu de chaleur. Pour l’écouter parler sur tout et n’importe quoi, que ça me berce toute entière, jusqu’à ce que je sombre et qu’il s’en aille. Car c’est comme cela que ça doit se passer.
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Aurelian L. Kieser
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Mer 29 Aoû - 5:01


With our eyes stuck to the stars


Ça a toujours été un peu complexe, entre les filles et moi. Elles m’ont toujours plus aimé que je leur rendais, d’aussi longtemps que je puisse me souvenir – et ce n’est pas peu dire. À part ma mère, bien entendu, on dirait que j’ai toujours pensé, consciemment ou non, qu’elles ne valaient pas la peine que je m’y attarde. Qu’elles étaient passagères, jetables, pas très intéressantes. Et cela s’est toujours fait spécialement sentir lorsque les filles étaient sur mon dos et qu’elles recherchaient clairement quelque chose de plus qu’une discussion ou qu’une relation amicale. C’était de les voir aller, à se frotter contre moi comme des chattes en chaleur, à me minauder des obscénités à l’oreille, à tout faire pour un regard, une caresse. Et après elles s’attendent à ce que je les traite avec respect? Les femmes qui agissent comme des putes sont traitées comme telles, point à la ligne. Plus encore que les mecs. Je ne sais pas pourquoi, mais c’est comme ça. Une genre de répugnance dont je ne connais pas l’origine. Ça n’est pas très important à comprendre, c’est juste… curieux.

Mais il y a des exceptions. Quelques-unes, rares. Elles ne se démarquent pas toujours au départ, s’insinuent dans ma vie comme tous les autres gens qui y passent. Mais parfois, elles ont quelque chose de spécial. Une lueur dans leurs yeux, une sincérité dans leurs mots. Une authenticité qui fait plaisir à voir, qu’elles la montre aux autres ou non. Et ça me donne envie d’apprendre à les connaître, et de protéger ce petit cadeau qu’elles me font en étant telles qu’elles sont. C’est là que je deviens l’Aurélian protecteur, fraternel. Celui qui veut veiller, protéger, défendre, couver. L’ami, le grand frère que je n’ai jamais été. Parfois c’est plus clair, parfois c’est diffus, mais c’est sincère et vrai. Cette dichotomie est parfois difficile à gérer. Voir les femmes comme des sœurs, ou encore comme des poupées à jeter. Et parfois, l’incertitude perdure au-delà des premières rencontres. Mais éventuellement, la différence se fait, le moule se perce, et je sais généralement bien qui je veux garder ou non dans ma vie. Elles aussi, finissent par le savoir bien vite. Je ne suis pas du genre à laisser les choses traîner. Et puis, c’est simple; une fille avec laquelle je couche, je ne la veux pas dans ma vie.

May, je la veux bien dans ma vie. J’pense que j’en suis encore à la phase floue avec elle. Après tout, cette petite surprise marque notre troisième rencontre, c’est encore tôt pour affirmer quoique ce soit. Mais déjà, elle ne s’accroche pas à moi comme une groupie en délire. Et elle est sympa, souriante, amusante. Et puis il n’y a pas de tension sexuelle désagréable; on passe très bien par-dessus le fait que, de toute évidence, elle est jolie, et que je pourrais potentiellement lui plaire. C’est pas à propos de ça, et je le sens déjà. Ouais, parfois elle a ces étoiles dans les yeux quand elle me regarde, mais je pense que cela vient plutôt d’une admiration plutôt que d’une envie physique. J’espère, en tout cas. J’ai un bon sentiment, venant d’elle. Que ça ne sera pas compliqué, qu’on pourra continuer d’apprécier la présence l’un de l’autre en fin de soirée. Mais c’est bientôt que l’on rentre à Virtus. Une chose est certaine, c’est que je ne l’oublierais pas. Même que je vais p’tet bien vouloir lui écrire. On verra. J’lui demanderai son numéro de portable.

Je lui souris du coin des lèvres, sans la quitter des yeux. C’est vrai qu’un poisson rouge avec de l’alcool dans le corps, ça ne doit pas être particulièrement productif comme bestiole. Je retiens ma vanne, de toute façon elle m’en empêche d’un frottement de sa joue sur mon épaule. Je la laisse faire, je devine qu’elle ne veut rien de plus qu’un peu de proximité. Je n’y réponds pas, parce que ce n’est pas nécessaire, au fond. Et puis, elle s’éloigne vite pour tirer sur le joint. Je la regarde faire, son acharnement à vouloir faire ce satané rond de fumée m’amuse. Ce n’est pas la première fois qu’elle tente son coup. Enfin, c’est déjà mieux que les fois précédentes, au moins ça ressemble un peu à quelque chose, là. Je ris en même temps qu’elle, passant le joint entre mes doigts, puis vient tirer un bon coup dessus. Ma tête se penche vers l’arrière, mon visage faisant face aux cieux, puis je relâche tranquillement la fumée par mes narines, la réaspirant de mes lèvres avant de la rejeter pour de bon dans un restant de rire. Pas de rond de fumée, je ne veux pas avoir l’air – trop – arrogant. Je l’écoute parler ensuite, attentif, mais je n’ai pas le temps de répondre qu’elle s’exclame qu’il y a une étoile filante. Mes yeux s’arrêtent fixement sur le ciel de la nuit, mon regard ne captant qu’un bref éclat de lumière, sans doute la fin de la queue de l’étoile filante. Je fais un souhait quand même, parce que ma maman m’a souvent dit de rester enfant quand je peux me le permettre. Et aussitôt, May me demande si je l’ai vue. J’hoche la tête sans dire un mot, ne perdant pas le vague sourire qui orne mes lèvres alors que je la regarde se rasseoir.

La Clever revient sur terre, atterrissant sur mon épaule. L’une de mes mains vient prendre appui derrière moi, la tête de May glisse un peu contre mon t-shirt alors que le haut de mon corps s’abaisse un peu. Elle sera un peu plus confortable comme ça, après tout. Je fume toujours paisiblement, bercé par la mélodie de la nuit et par la respiration régulièrement de la jeune femme aux cheveux bleus. Respiration qui se brise alors qu’elle vient me poser une question. Le bal. C’est évident, avec qui j'y serai. Ça doit bien faire une semaine que c’est un sujet de conversation régulier pour nous deux. Pour être bien fringués, bien préparés.


    « J’y vais avec Nikolaï. On a déjà parlé de lui. Mon petit ami. »


Je ne m’attarde pas trop longtemps au doute qui règne dans mon esprit. J’ai envie de l’appeler comme ça, mais je ne sais pas si lui me laisserait faire, s’il l’entendait. C’est… complexe. Je change de sujet, vite.

    « Toi tu dois avoir au moins 10 courtisans. T’as arrêté ton choix sur quelqu’un?»


Je lui donne un tout léger coup de coude sur le côté, juste pour la taquiner. Et tout ce temps, je n’ai pas arrêté de sourire. Cette fille me calme. Peut-être qu’un jour, je vais me confier à elle. En attendant, je l’écoute, je la supporte, et je lui sers d’oreiller. Always with a smile.



Dernière édition par Aurelian L. Kieser le Mer 29 Aoû - 13:16, édité 1 fois
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May Bastide
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Mer 29 Aoû - 12:06

Il l’a vu ! Il a vu l’étoile filante, alors j’explose de rire, le nez dans ses manches, presque fière de m’apercevoir que l’alcool ne m’a pas encore assez influencé pour me priver de vœux nocturnes. Je contemple les astres, attentive et silencieuse, à l’affut d’un second caillou qui viendrait se cracher dans notre atmosphère, mais rien ne se passe. Juste trois grillons qui massacrent le silence nocturne, le courant de la rivière qui joue le fond sonore, et ma voix qui ose chantonner un morceau de Keane, doucement, faiblement. Je ne lui demande pas son souhait, de peur qu’il ne se réalise pas, et parce que je lui veux tout le bien du monde, à Aurelian et je l’écoute me parler d’un certain Nikolaï.
Je ne peux m’empêcher de sourire quand je l’entends poser deux pauvres mots vides de sens sur la nature de leur relation. Petit ami ? Quoi c’est tout ?! Bien sûr que non, à d’autres pas à moi, on ne décrit pas toute une histoire entre deux êtres avec un banal groupe nominal sans couleur et sans relief : du gâchis. Pas besoin d’en débattre pour savoir qu’Aurelian était du même avis. Ma question me paraissait à présent des plus stupides, évidemment qu’il irait avec Nikolaï, ne pouvait-il seulement y avoir quelqu’un d’autre ? Non, je ne crois pas. De tous les prénoms sortis de la bouche d’Aurelian, il n’y avait à retenir que celui là. A peine l’évoquait-il que son visage s’adoucissait et ses yeux changeaient de lueur ; il troquait son attitude détachée et impassible pour s’offrir aux rêveries des gens qui aiment à en mourir. Dans ces moment-là, je ne savais pas vraiment si je l’enviais ou le plaignais : veut-on vraiment tous d’une passion dévorante qui abîme les cœurs et fatigue les âmes ? Rien de moins sûr. Et pourtant on en crève tous d’envie, d’être aimé à s’en faire mal et d’aimer à s’en brûler les doigts.

Feignante, paresseuse, je laisse glisser ma tête jusqu’à ses genoux pour profiter du ciel et d’un oreiller de chaire. Sans gène, je me dis juste qu’il pourra me pousser et m’envoyer paître si je le dérange ; de toutes façons, je ne l’adore pas de cette manière. D’un car il est bien trop magnifique pour que je ressente autre chose que de l’admiration à son égard, de deux car Aurelian est un Bro, et on ne fantasme pas sur son Bro ! Bien callée sur ses cuisses, un coup de coude amical et une question taquine m’interrompent dans mon observation stellaire. J’inspire profondément et ris jaune : la fameuse invitation au bal…

«  Pas tant, Aurelian, pas tant !  »


Juste deux, ça suffira. D’un accord muet, Léo et moi avions prévu d’y aller ensemble, comme si c’était normal, comme si c’était évident. Je le voyais déjà dans son superbe costume, passé au coiffeur pour l’occasion, trois pas sur la piste, quelques minutes à danser dont deux à me râler dessus parce que je suis nulle en valse. Il aurait finalement abandonné l’idée de me faire tournoyer sur les carreaux pour m’emmener dans sa chambre, et on aurait fini la soirée tous les deux, à massacrer les enseignements du catéchisme. A cette soirée comme une autre, j’y croyais dur comme fer.
Jusqu’à ce que je croise Will.
Sur un coup de tête, il m’avait demandé de l’accompagner. Sur un coup de tête, j’avais accepté. Sans savoir pourquoi, sous le choc de l’étonnement, les yeux exorbités devant Will et sa nonchalance et cette proposition que j’étais bien loin de prévoir. D’un côté, ça permettrait à Léo de se taper tous ce qu’il voudrait, et de danser plus de trois minutes d’affilées avec des créatures bien plus gracieuses et attrayantes que moi. Mais quand même. Je me sentais mal à le laisser y aller tout seul. Pas que je doute qu’il ne se trouve quelqu’un au cours de la soirée, c’est que ça me faisait juste tout drôle de le savoir sans moi.

«  Je vais y aller avec Will. Enfin…je crois. S’il ne me laisse pas en plan, disons.  »


Parce que je ne savais jamais à quoi m’attendre, avec Monsieur Turner. Et que parfois, il ne valait mieux pas savoir. Je soupire à nouveau, enfonçant mon crâne sur le pantalon d’Aurelian, me cachant les yeux comme si je me planquais des ennuis, par ce biais. Je culpabilisais monstrueusement, pourtant le lien que nous avions construit, Léo et moi, aurait du nous préserver de ce genre de conneries. On avait dit « que du fun », mais moi, là, je ne riais pas du tout.
Agacée par cette vie qui ne tournait pas comme je le voulais, je grognais bruyamment, dégageais mes paumes de mes yeux et agrippaient le col d’Aurelian :

« C’EST NUL D’ETRE UNE FILLE ! Je vais me faire poser un chromosome Y, ce sera plus simple ! »

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Ven 31 Aoû - 4:56



Tell me what you know about the night terrors, every night.

Five A.M., cold sweats, waking up to the skies.


J’aurais été prétentieux, culotté et complètement idiot si j’avais pris le statut de ma relation avec Nikolaï pour acquis. Ça m’arrive, de prendre certaines choses pour acquises. Parce que je suis un enculé parfois, un enculé hypocrite et manipulateur. Parce que j’aime bien avoir tout ce que je veux quand je le désire et pour réussir, il faut croire que ces choses, que ces gens nous appartiennent. Il faut être arrogant, hautain, voir machiavélique pour vivre la vie que j’ai vécue. Et encore aujourd’hui, ça se fait sentir. J’utilise les gens qui n’attirent pas mon respect. Sans honte, sans gêne, et sans même essayer de me cacher. Et la plupart de ces personnes sont assez idiotes pour se laisser faire, la plupart de ces personnes y prennent un certain plaisir. Plaisir tordu. C’est quelque chose que je peine à comprendre, lorsque je m’y attarde. Ce que je ne fais pas souvent. Parce qu’à vrai dire, j’en ai rien à branler. Tant que j’arrive au bout de mes envies, c’est tout ce qui m’importe. Et tant que je peux le rendre heureux et le faire sourire. Peut-être parce que si j’ai cela, si j’ai son amour et si je vois son bonheur, obtenir ce que je veux des autres n’est réellement pas si important que cela. But I’ll always get a kick out of being an asshole and getting away with it. Ça a quelque chose de follement divertissant. Avoir le monde au creux de sa main. Heureusement qu’il est là pour me redescendre sur terre.

Mais je ne peux pas prétendre que tout est redevenu comme c’était avant après avoir disparu sans dire un mot. Et après être réapparu tout aussi subitement. Je ne peux pas lui faire ça. Je me rends moi-même confus, je ne peux même pas imaginer ce que ça doit être pour lui. Les habitudes, les routines, les plaisirs qui se réinsèrent dans notre relation, alors que nos esprits restent toujours un peu accrochés à l’amertume et la douleur du départ. Cette envie de ne faire qu’un l’un avec l’autre, de s’enchaîner l’un à l’autre, de s’aimer sans limite. Et cette peur persistante que ce n’est que passager, que le bien-être n’est qu’éphémère, que c’est condamné à l’échec et au déchirement, encore une fois. Ça me donne envie de me battre pour lui, pour nous. Il faudra briser notre nid de confort pour confronter le passé, bientôt. Je le sais, je le sens venir, même. Nous avons peur, tous les deux, et cela se fait sentir. Et quand on le sent trop, on sniffe un rail, on se shoote, on se fait l’amour. J’ai atrocement peur du soir où on devra faire face à cette bête noire, à ce monstre qui s’insinue entre nous. It keeps me up at night. Ça me hante, littéralement. Si Niko voyait ce que j’écris dans mes carnets de note… Enfin… Probablement que ce sont des choses auxquelles il pense lui aussi. We just don’t talk about it.

May me sort de ma torpeur en se laissant glisser contre le sol, quelques lambeaux de sa robe légèrement déchirée pendouillant du vêtement. Sa tête légère vient se poser sur mes cuisses, et je ne bronche pas. Ça ne me dérange pas. J’ai peut-être moins besoin de ce contact qu’elle, mais au fond, ça a quelque chose de rassurant, de vrai. Un contact sincère, amical, doux. Pas compliqué, juste agréable. Je la regarde d’en haut, tirant quelques petits coups sur ce qui reste du joint avant d’en jeter le mégot dans l’herbe d’une pichenette habile. Pas tant de courtisans? Ça impliquait tout le même qu’il y en avait plus qu’un. Et ça ne me surprend pas, d’une certaine façon. Cette fille a du charisme, sans être particulièrement impressionnante. Elle a quelque chose de foncièrement attachant, ça ne s’explique pas. C’est juste comme ça. J’attends des précisions, la regardant toujours du coin de l’œil alors que je relâche finalement la fumée qui envahissait mes poumons par les narines. Elle semble hésiter. Ce n’est facile pour personne, les relations interpersonnelles.

Puis elle me dit qu’elle va y aller avec Will. William. Lawford? Je ne lui ai jamais vraiment parlé. Je me souviens de son nom, de son look. Pas moche, mais c’est pas spécialement mon genre. Et on dirait qu’il me plait encore moins maintenant que je vois que ça tourmente May. Sa chevelure bleue s’enfonce un peu plus fermement sur mes cuisses, et par réflexe, ma main vient la rejoindre. Mes doigts capturent quelques mèches et se mettent à jouer avec, distraitement, sans que je n’y pense vraiment. J’en enroule une autour de mon index, j’en pince tout délicatement une autre de mon pouce. Mon regard se fixe un instant sur l’horizon, impassible. J’espère que le bal se passera bien pour elle. Apparemment, ce sont le genre de choses qui sont importantes pour les filles. Avant que je n’aille le temps de dire quoique ce soit, elle lève le ton, ses mains se posant sur le gros col bombé de ma veste. Je la regarde droit dans les yeux, un mince sourire se raccrochant à mes lèvres, lui je lâche un petit rire alors que je libère ses cheveux et que mon index vient se poser brièvement sur le bout de son nez.


    « Un XXY, c’est jamais joli de toute façon. Et puis, c’est pas plus facile pour les mecs, j’t’assure. On est juste plus idiots, alors on n’en parle pas. »


Ses doigts relâchent le tissu de mon vêtement, et j’en profite pour accrocher les miens à la fermeture éclair, que je fais descendre. Machinalement, j’enlève ma veste, la brise fraîche du mois d’Août me faisant frissonner à travers mon t-shirt, et je viens la poser sur May. Elle en a plus besoin que moi. Peut-être qu’elle ne s’en rend pas tout à fait compte, mais je le vois, moi, que l’air froid et traitre insiste un peu trop sur sa peau exposée aux caprices de la nature à cause des multiples déchirures dans sa robe.

    « En tout cas, tu me laisseras savoir, si tu as des ennuis, okay? »


Et mes doigts qui se remettent à tresser ses cheveux.

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May Bastide
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Sam 1 Sep - 0:07

La remarque d’Aurelian me fait rire plus qu’elle ne me rassure : quoi, plus idiot que moi ? Dans tes rêves. Je ne réfléchis jamais assez, et le pire doit être que j’en sois consciente. Je cueille ce qui me tombe sous la main, si la baie est jolie, son poison m’importe peu ; profite de tout ce qui m’arrive du ciel et ignore en les évitant du regard tout semblant de conséquence. S’il arrive quelque chose, c’est qu’elle devait arriver, pour l’orientation de mes jours, je fais confiance au destin, même si parfois il fait sa pute et me fourre dans des situations à la con. Je m’en sors avec un « c’est comme ça », avec un « c’est la vie » et je passe mon chemin. C’est pour ça, Aurelian, je doute que n’importe quel garçon soit plus stupide, plus irréfléchi, plus déraisonné que moi. Mais ça tu le sais, je n’ai pas besoin de te le dire, tes propos sont juste polis, tes paroles sont juste gentilles.


« Je m’en fous d’être joli, si c’est pour sauter pieds joints dans la merde, comme ça. »

Vous m’excuserez la délicatesse, mais trois heures du matin passées, ma vulgarité légendaire prend bien vite le dessus. Je tends mes bras très haut au-dessus de moi, et je m’entraîne à voir clair, à distinguer en détail mes annulaires qui se dessinent dans le noir.


« Et d’abord, je te vois mal idiot, Aurelian. Qu’est-ce qui te tracasse pour me dire des conneries pareilles ? »

Je ne sais pas pourquoi je demande, en fait je sais déjà. C’est forcément en rapport avec cet homme aux cheveux bleus, on s’entendrait forcément bien, d’ailleurs ! Je lui filerai des tuyaux pour se faire des couleurs sans s’abîmer les cheveux, et Erika lui ferait des supers soins qui vous font secouer la crinière en gueulant un « L’oréal, parce que je le vaux bien ! ». Et ce garçon qui me paraît déjà si génial, de loin, je crois qu’il est le seul capable de dessiner une expression inquiète sur les traits si durs d’Aurelian. Alors j’ose balancer ma sotte question, en sachant pertinemment qu’il n’y répondra sûrement pas, gardant jalousement ce qui n’appartient qu’à eux, peut-être même aussi leurs problèmes.
Je laisse tomber mes mains sur ma poitrine et clos mes paupières sous les doigts d’Aurelian. Ma peau frissonne au contact humide de sa veste, mais se délecte bien vite de l’excès de chaleur qu’elle apporte ; comme un chaton trempé, je me roule en boule, soucieuse de caser chaque parcelle nue de mon corps sous le vêtement d’Aurelian. J’en ronronnerai de bonheur, si seulement je le pouvais, mais comme je ne suis pas Boris, je me contente de soupirer de bien être, en profitant encore de ses doigts brûlant dans mes cheveux et en murmurant un « merci » juste assez fort pour qu’il l’entende.
L’excitation passée, la sensation de froid se décuple, et je m’en échappe en me collant un peu plus au radiateur ambulant d’un mètre quatre vingt quinze, laissant sa douce chaleur se diffuser en chaque centimètre cube de mon être. Je me sens si bien, que je m’endormirais presque. Quand il reprend la parole et me sort de mon semi coma, je ne peux m’empêcher de sourire, et d’affirmer sans réfléchir, comme d’habitude, d’une voix faible et fatiguée :


« Promis, promis. »

Menteuse. Horrible mythomane je fais là. Comme si j’allais lui prendre de son temps, l’ennuyer de mes problèmes de sale gamine, tout juste embêtée par un trop plein d’affection. Attendrie par sa bienveillance qui ne lui collait pourtant pas à la peau, je me tais et je savoure ces tendres instants qu’il veut bien me prêter. Ils nous seront retirés très tôt, dans quelques heures, puis définitivement, dans quelques jours, et je n’ose pas y penser, parce que je ne sais pas, je n’ai pas encore décidé si Aurelian allait me manquer.
Comme si j’avais le choix.
Oh non, voilà que je prends le cafard. Et je me recroqueville un peu plus, enfouie sous son blouson rassurant, géant sur mes frêles épaules. S’il avait des problèmes, moi aussi je voudrais bien qu’il me le dise, parce que je suis pas bien intelligente, et sûrement de mauvais conseil, mais on peut au moins se servir de moi comme bélier ou comme massue, si je contracte très fort mes abdos pour pas bouger. Alors je lui propose mes minables services, la voix rauque d’avoir trop chanté :


« Toi aussi, n’hésite pas à me parler, Aurelian. Si quelqu’un t’emmerde, je te promets que je lui refais son portrait façon Picasso ! »

Et je lui montre mes maigres bras, en mimant un ridicule combat de boxe écourté, ponctué de cris de ninjas et de fausses plaintes hyperboliques. Je ris doucement de ma stupidité maladive en plaignant un peu Aurelian qui doit supporter tout ça, et je me tiens le ventre qui commence à me faire mal : la vodka, c’est pas bon pour ma petite constitution. Aux grands maux les grands remèdes, j’empoigne la bouteille qui traîne, en avale quelques gorgées qui me brûlent les tripes et espère qu’à défaut d’empirer la situation, ça la calmera pour les heures qui viennent. Assommée par l’alcool, les yeux lourds de sommeil, je les tourne vers Aurelian, sincère et surtout, à moitié torchée :

« Sérieusement, hein ? Moi je veux pas que tu ailles mal, je veux que tu souris tout le temps, et que tu ne pleures jamais. D’accord ? Que tu sois heureux ! Plus heureux que tout le monde. »

Et c’est à ce moment là qu’un éléphant rose traversa mon champ de vision.
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Sam 1 Sep - 6:17




I took a sip of something poison but I’ll hold on tight


Qu’est-ce qui me tracasse? Sa question me fait sourire discrètement. Sourire à la fois triste et amusé, amer et attendri. Sa question mérite que je m’allume une clope, même. Parce qu’à simplement mentionner mes tracas, ils refont surface, et j’ai besoin d’une dose pour m’aider à les confronter. Je vais quand même pas me taper un rail alors qu’elle est juste là, la nicotine devra suffire. Ma main libre s’étire jusqu’à la poche arrière de mon pantalon et capture habilement entre ses doigts une cigarette. Je la porte à mes lèvres, l’allume d’un coup de briquet puis tire vaguement dessus, sans que mes yeux ne quittent la voûte étoilée. Je rejette les premières volutes de fumée d’entre mes lèvres, camouflant par la même occasion un maigre soupir. Qu’est-ce qui me tracasse? En ce moment, ça serait plus facile pour moi de répondre à la question contraire. Qu’est-ce qui ne me tracasse pas. Ça serait beaucoup moins long à énumérer, à expliquer. Tous les dons viennent à un certain prix, ça, je le sais. Mais je me permets de prétendre que ça me coûte peut-être un peu plus à moi qu’aux autres. Ah, t’as de la chance, qu’on me dit. T’as pas besoin de réviser pour les cours, tu te souviens de tout. Une lecture et t’es près à avoir une note parfaite à un examen. Tes dessins sont magnifiques, c’est comme si on y était, tellement c’est réaliste. Si je te demande de me raconter ta journée du 13 avril 2002, tu y arrives? Taisez-vous, tous. You have no idea of how bad it can get.

Vous ne savez pas ce que c’est, avoir envie de crier à s’en exploser les poumons à cause d’une migraine insupportable. Vous ne savez pas ce que c’est, des idées qui s’entrechoquent, qui se mélangent, qui apparaissent, disparaissent, s’imposent et s’effacent continuellement. Vous ne connaissez pas la mélodie chaotique de voix, de mots, de chants qui reviennent aléatoirement à l’esprit. Vous ne savez pas ce que c’est, d’avoir des séquences de chiffres dans la tête, des cartes, des schémas qui se répètent, qui fracassent tout espoir d’avoir l’âme en paix. Les gens, les évènements, les sensations, tout est absorbé à la perfection et je ne peux pas m’en débarrasser. Mon inconscient est saturé et même si ce n’est pas tout qui me revient en même temps à l’esprit, il y a toujours quelque chose d’envahissant en arrière-plan. Des idées que je me ressasse. Et après on se demande pourquoi je me drogue. Parce que je sors de ma tête, un peu, et j’entre dans mon corps, je me laisse transporter par lui sans toujours avec ces foutues pensées qui m’agressent et me blessent. Et dernièrement, ça a quelque chose de particulièrement amer.

Je pense à combien de larmes il a pu pleurer à cause de moi, quand je suis parti. Je pense à notre ancienne vie, à nos moments d’ivresse et d’amour. Je pense à ses yeux dans les miens, je pense à comment je l’aime à mourir. Et à comment je ne mérite pas tout l’amour que lui me donne. Je pense à comment je suis indigne de sa dévotion et de ses baisers, je pense à comment j’aurais dû rester avec lui, ce matin-là. Que j’aurais dû rester au lit jusqu’au matin, que j’aurais dû le réveiller de quelques baisers au creux du cou, de mots doux murmurés. Que j’aurais dû le laisser somnoler paisiblement encore quelques minutes, le temps que je me douche et que je préparer son chocolat chaud. Que j’aurais dû revenir m’asseoir sur le matelas avec lui, tasse à la main et sourire aux lèvres, avant de reprendre le rythme effréné de nos vies ensemble. On aurait pu s’en sortir à deux. Nous allons nous en sortir, à deux. Je m’en veux tellement de nous avoir fait ça. Toute cette douleur n’était pas nécessaire, et maintenant, elle tache notre relation. Et ça me fait mal, terriblement mal. Et ça me tracasse. Ça me hante, ça me dévore. Aussitôt que je ne suis pas avec lui, aussitôt qu’il ne me sourit pas, qu’il n’est pas dans mes bras, ça me revient. Mais malgré tout, j’ai espoir. Parce que l’on s’aime assez pour grandir de cela. Je ne partirai plus jamais.

May passe vite au prochain sujet lorsqu’elle comprend que je ne répondrais pas à la question. Elle me rassure à moitié qu’elle viendra me voir qu’il y a quelque chose qui ne va pas, et c’est vrai que j’aimerais qu’elle le fasse. Mais bien vite, nous allons rentrer à Virtus. Je pourrais toujours l’aider un peu à distance, faute de pouvoir être à côté d’elle, j’imagine. Si elle a besoin de moi, bien entendu. Elle se colle un peu plus contre moi; ma main cesse ses caresses dans ses cheveux et se pose tout calmement contre le haut de son dos, maintenant immobile. Je vais lui manquer, je crois. Et j’pense qu’elle me manquera aussi. La belle aux cheveux bleus sort justement de sa torpeur alcoolisée l’espace d’un instant pour me dire qu’elle s’occuperait volontiers du cas d’un potentiel emmerdeur. Ses mimiques me font rire, sincèrement, puis j’hoche la tête pour toute réponse. Bien entendu, que je ne lui dirais rien. Elle a bien trop de souci de son côté, et puis les miens, je peux m’en charger tout seul. Avec la drogue. Et Niko. Ça a toujours été comme ça. Je la regarde prendre une gorgée de vodka du coin de l’œil puis lui vole la bouteille des mains pour faire pareil. J’y remets le bouchon, je la laisse s’écraser au sol puis je lance mon second mégot dans l’herbe froide et verte, au loin. Je croise vite le regard embrumé de May, et ce qu’elle dit m’attendrit, je n’ai aucun mal à l’admettre. C’est sans doute l’alcool qui parle un peu, mais je sens bien qu’elle pense ce qu’elle dit. Un sourire sincère se dessine au coin de mes lèvres avant que je ne lui répondre, le ton bas, calme, doux.


    « J’vais faire de mon mieux. Si tu fais pareil. »


Et j’en profite, pendant qu’elle n’est pas complètement coma, pour sortir mon portable de ma poche. On m’a envoyé un message, c’est Niko. Je le lis. Il me dit merci de l’avoir envoyé au lit, parce qu’il n’est vraiment pas bien, et qu’il a hâte que je vienne me faufiler sous ses draps pour le soigner. Mes traits durs se calment, s’apaisent, alors que je fixe le téléphone un instant. Bientôt, chéri. Le temps que je la porte à sa chambre. Ça marquera mon deuxième voyage jusqu’à son dortoir, d’ailleurs. Je change l’écran à celui d’enregistrement d’un nouveau contact puis je reporte mon attention sur May.

    « Tu me refiles ton numéro avant que je t’emmène jusqu’à ta chambre, la belle au bois dormant? »

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Sam 1 Sep - 12:09

Ça sera bizarre. Tellement étrange, quand vous vous alignerez tous, les uns derrière les autres, pour grimper dans ce bus, sac à dos sur l’épaule, sourire aux lèvres et larmes aux yeux peut-être. Quand le moteur ronronnera brusquement, que le pot d’échappement crachera un énorme nuage noir et qu’on vous cherchera tous du regard, dans ce car bondé, où certaines inscriront des cœurs dans la buée, où d’autres soupireront de soulagement d’enfin échapper à ce séjour éprouvant. Je me rassurerai en voyant une tête verte dépasser, je lui ferai de gigantesques coucous en lui criant de ne pas m’oublier, et en lui souhaitant bon voyage. J’apercevrai une fine silhouette discrète, dans les places du fond, côté allée, là où on les voit le moins de l’extérieur, et même si je sais d’avance qu’il ne me verra pas, qu’il n’essaiera pas de me trouver, je lui enverrai de faux baisés à travers les carreaux imprimés de traces de mains. Une chevelure blanche princière s’imposera peut-être à mes iris, et je montrerai à Léo l’objet de mon courroux, en fulminant rageusement et en crachant quelques insultes. Aniela, Raven, Lyria. Peut-être même cette douce Camille dont Léo s’était épris. Ils me manqueront tous, à leur manière. A cette façon qu’ils ont eu de marquer ma vie. Et je ferai de mon mieux ! De mon mieux pour ne pas les oublier, pour que mes souvenirs restent fidèles à ce qu’ils furent, le temps d’une semaine d’été français, à la lumière d’un soleil éclatant et à l’abri de jardins tranquilles.

Traitez moi d’égocentrique, si vous voulez, mais dans un sens, cette malédiction que porte Aurelian, j’en suis parfois heureuse : au moins, il ne m’oubliera pas. Je ne serais pas de ces ruines de la mémoire, une tâche bleue dont on ne se rappelle que de la couleur des cheveux, sans pouvoir poser une voix ou un visage dessus. Non, je serais au moins un peu plus, pour une seule personne. Quand dans dix ans, vingt ans, trente ans, nous nous serons tous éclatés aux quatre coins du monde, il y en aura au moins un qui se rappellera de moi. Et bien sûr, ce sera réciproque. Car celui dont l’entrée dans le bus me serra la plus difficile, c’est bien toi, Aurelian. Mais comme si je pouvais te le dire. Comme si je pouvais t’annoncer comme ça, que trois pauvres soirées ont un peu trop compté à mes yeux, assez pour que je souhaite qu’elles se répètent un peu plus longtemps, assez pour que je ne veuille pas qu’elles se terminent. Assez pour que tu prennes une place suffisante, juste bonne à me faire verser trois putains de larmes quand tu dégageras du sol français.
Mais pour l’instant, on n’en est pas là, pas vrai ? Pour le moment, je contemple ces volutes grisonnantes qui dévorent les étoiles, à chaque bouffée que tu souffles, en pensant que je veux pas rentrer dormir. Je veux pas voir Léo, sa mine vexée et son regard blessé. Et je veux pas aller au bal, m’accrocher au bras de Will et me battre toute la soirée. Je veux rester dans l’herbe humide, attraper la crève, et t’écouter me dire de beaux charmants mensonges.


« T’inquiète pas, moi je suis toujours heureuse ! »

Et dans un sens, c’est vrai, disons que j’ai juste des déprimes passagères, des éclats de prises de conscience, qui viennent perturber ma béate vie, rien de plus, rien de moi. Votre départ imminent, ça me file le bourdon, et ça m’assombrirait presque le visage, si j’y pensais plus. Mais comme je suis idiote, et comme j’ai un peu peur, je n’y réfléchis pas plus que ça, et je comble mon cerveau d’actions plus abruties qu’inutiles. Une lumière bleutée vient m’arracher un froncement de sourcil, à travers mes lourdes paupières, je perçois l’origine de mon aveuglement : un téléphone, bien sûr. Sûrement que Nikolaï l’attend, il va falloir que je déguerpisse, moi ! Peut-être dans les draps de Léo, s’il n’a trouvé personne ce soir, au moins ça comblera mon sérieux manque affectif. Tiens. Je me dégoûte. Je ferais mieux de rentrer au couvent, ou dans un temple tibétain, ça me calmerait un peu, peut-être. Et encore. La question d’Aurelian m’étonne, et me fait sortir brusquement de mon sommeil comateux : si je m’y attendais ! Moi qui pensait obstinément ne plus jamais avoir affaire à Aurelian à partir du moment où il poserait ses fesses dans le car du retour, je me relève brusquement, le sourire jusqu’aux oreilles et le ton enjoué :


« Oui ! Oui oui oui oui oui ! Passe ! Je vais te l’écrire ! »

Sans vraiment attendre sa permission, je lui choure son portable des mains et active le mode « super rapide » de mes phalanges : mes doigts volent sur le clavier, dévorée par un enthousiasme non dissimulé. Je valide. Ils demandent un nom. Je tape ce que je crois être « May » mais qui s’avérera plus tard être « Myakjhfjqs », faute de l’alcool, mais chut. Je lui tends son téléphone, toute contente, et mon métabolisme me rappelle que je ne suis qu’une loque à moitié sèche, du coup je m’écrase sur ses genoux, morte de rire. Pour rien. J’anticipe le moment du départ, alors je lui rends sa veste, m’assois et lui tends mes bras pour qu’il m’aide à me relever : j’espère que j’arriverai à marcher. Au pire, je dors ici, c’est pas la mort ! Et en attendant qu’il se décide à m’aider, parce qu’au fond je ne lui laisse pas vraiment le choix, mais c’est pour me venger d’à quel point il va me manquer, je marmonne dans mon discours d’ivrogne :

« …t’as pas intérêt à m’oublier, Aurelian… t’as pas le droit.. »

Parce que moi, je ne t’oublierai pas.

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Mer 5 Sep - 4:03


You can stand under my umbrella


Je n’ai jamais été doué avec l’expression de mes propres sentiments. Non seulement je n’ai jamais vraiment appris à le faire, mais ça ne m’intéresse pas. Ça fait limite cliché, le type ténébreux et stoïque qui garde tout pour lui, mais en fait, ça me colle plutôt bien à la peau. Sauf avec Niko. Même quand j’en viens à coller mon poing sur la gueule d’un type, je reste impassible ou presque. Y’a que Nikolaï, en fait, qui a droit à des réactions plus humaines, plus normales. Et ça me vient sans que je ne me force, c’est tout naturel, c’est juste… comme ça. Il me change, pour le mieux. Je me permets de sourire, de rire sans gêne, de prendre la vie un peu moins au sérieux. Et c’est peut-être le seul qui m’a vu m’emporter par amour. Quand un type insistait trop auprès de lui, ou quand il était tellement défoncé que j’en avais peur pour lui. Sans que je ne perde totalement mon légendaire sang-froid, c’est lui qui m’humanise. Même ma mère n’a plus droit à cette authenticité. Avant, peut-être. Mais j’ai trop changé. Elle ne connaît de moi que ce que je veux qu’elle sache et ce qui est tout simplement évident. J’adore ma mère, mais je ne voudrais pas l’inquiéter avec mon rythme de vie. Alors devant elle, je suis l’Aurelian qu’elle veut que je sois. Intelligent, discret, protecteur. Le reste, même elle ne veut pas vraiment le savoir. Je porte mon masque. Un parmi tant d’autres.

Mais malgré tout cela, le comportement humain m’a toujours sincèrement fasciné. C’est tellement facile d’apprendre à connaître les schèmes de pensée d’un individu lorsqu’on se souvient de chaque fois que cette personne à fait ou dit quelque chose dont on est témoin, ou à chaque fois qu’elle nous adresse la parole. Les quelques livres de psychologie que j’ai lu ont également aidé. Ça m’amuse, décoder les gens, les humeurs, les raisons derrière leur comportement. Peut-être que c’est pour cela que j’ai une certaine facilité à manipuler les gens. Parce que j’apprends vite comment ils fonctionnent, le processus logique derrière leurs idées. On apprend que l’humain est prévisible, soi plus que les autres. On apprend qu’on est tous différents mais qu’au fond, on est tous pareils. On recherche les mêmes choses, mais pas de la même manière. On reste un animal d’instinct, mais qui pense beaucoup trop pour son propre bien être. C’est peut-être ça que j’aime de May, en fait. Parce que justement, elle n’essaie pas de mener ses idées au-delà de leur réalité présente. Oui, elle fait un peu naïve, un peu simple, mais les gens seraient tous tellement plus heureux s’ils étaient comme elle. À ne pas s’en faire trop souvent, à ne pas se prendre la tête, à ne pas toujours penser au pire scénario, à se dire que peut-être, les choses peuvent être bien et qu’on a de bonnes raisons d’être heureux. À le montrer, qu’elle est heureuse. Je l’envie tellement pour ça. J’aimerais pouvoir passer par-dessus, moi aussi. Au lieu de toujours ressasser, interpréter, cacher. My nights would be so much more peaceful.

Toujours est-il qu’au moment où je lui demande de me laisser son numéro de portable, elle est heureuse, vivement, même avec la quantité d’alcool qui rôde dans son sang. Je lui tends mon téléphone avec un sourire, en regardant ses doigts effleurer l’écran tactile avec enthousiasme. Je vois déjà qu’elle fait des fautes dans son nom, mais je ne m’en fais pas plus avec ça. Le numéro semble, des mouvements que j’en ai observés, être un numéro valide. Je le testerai demain, pour être certain. Elle me le rend, je l’attrape juste au bon moment. Elle, avec le portable. Je ne retiens pas un rire léger lorsqu’elle prend appui sur mes genoux, récupérant l’appareil électronique et le remettant à l’abri, dans ma poche. C’est l’heure de partir. Dans un mouvement fluide, et probablement sans qu’elle ne réalise totalement ce qui se passe, je me lève puis l’aide à son tour à se redresser. Bien vite, May est sur ses pieds, mais je ne fais pas tout à fait confiance à ses habiletés motrices. Pas tout de suite. Pas pour cette nuit. Je l’écoute me dire que je n’ai pas le droit de l’oublier. Et pour un instant, mon regard se fixe dans le sien. Et je lui souris. Pour un instant, je suis attendri, vraiment attendri. Je ne réponds pas tout de suite, par contre. En la guidant, mais sans insister, je la fais passer derrière moi et je me penche, l’attirant vers moi d’une pression sur le haut de la cuisse. Et tout naturellement, puisqu’elle comprend sans que je n’aie besoin de dire un mot, elle passe ses bras autour de mes épaules et grimpe sur mon dos. J’accroche mes mains au dessous de ses genoux, m’assure qu’elle tient solidement mes épaules, puis je me mets en marche vers le château.


    « Je ne t’oublierai pas, May. »


Pas que parce que je ne peux pas. Pas que parce que je suis né avec un don qui tient souvent de la malédiction. Parce que je ne veux pas l’oublier. Parce que même si je ne dis pas un mot, elle va me manquer aussi. Parce que trois soirées à parler et boire, ce n’était pas assez. J’aurais voulu en savoir plus sur elle. Peut-être que j’aurais la chance de la découvrir un peu plus? Alors que je marche vers l’établissement, je sens la respiration de la demoiselle que j’ai sur le dos s’apaiser, se stabiliser. Je n’ose pas la déranger, peut-être qu’elle dort. Elle se réveillera dans son lit, ce sera beaucoup plus confortable que dans l’herbe fraîche. Et peut-être lui aurais-je épargné une désagréable scène de fin de soirée? Au fond, tout ce que je veux, c’est son bien.

Mon don m’aura bien servi à me souvenir du chemin vers sa chambre.


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May Bastide
May Bastide
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Ven 7 Sep - 21:24


    C’est pas souvent. C’est pas souvent qu’il sourit, Aurelian. Enfin pas devant moi, sûrement sans arrêt, devant ce fameux Nikolaï, mais pas devant moi, alors ça me fait tout drôle, ça me paraît très étrange. Pas un mot, juste mes pupilles qui scrutent son visage, qui s’accrochent désespérément à cette tendre image que je ne reverrai pas de sitôt, qui se fixent sur ses lèvres et qui n’en démordent pas : attends, encore une seconde, que je t’enregistre bien, moi qui n’ai pas ta mémoire, attends-moi, Aurelian. Voilà, c’est bon, c’est dans la boîte, tu me relèves vite, un peu trop, mon monde tourne, le tien non, ta stabilité m’impressionne, mais je ne te complimente pas, tu le sais déjà, tu le devines certainement. Et quand le sol reprend de sa raideur, le premier truc sur lequel mes yeux se posent, c’est ton dos qui me crie « MONTE MOI DESSUS », alors tu penses, fallait pas m’y inciter deux fois.
    En mode bébé-koala-qui-vient-de-naître-et-qui-est-déjà-trop-flemmard, je te laisse me hisser sur ton dos, ne déployant pas plus d’effort que celui de passer mes bras autour de tes épaules pour me laisser porter. J’ai toujours ta veste sur les miennes, et tant mieux parce que j’ai froid. Toi, par contre, tu brûles. A cause des drogues, de la danse, de je ne sais quoi, je m’en contrefous. Je m’étale de tout mon long sur ta colonne interminable, profitant de cette douce chaleur que tu dégages et qui me consume lentement, doucement, à la limite du tendrement. Le visage enfoui entre tes deux omoplates, je fais semblant de ne pas entendre ta réponse, parce que je ne vois pas quoi rétorquer, trois secondes de silence, tu comprendras bien tout seul, tu sentiras bien par toi-même que tu m’étreints de bonheur, à me murmurer ce que je souhaite entendre.

    Tu ne me voyais pas, mais quand je me suis endormie, avachie sur ton dos, le front contre ta nuque, je souriais.




    Les matins, c’est pas mon truc ! C’est ce moment particulièrement désagréable où tu te réveilles le cerveau sens dessus-dessous et où tes connards de potes se pointent le sourire aux lèvres avec des photos de toi en train de nager à poil dans la Loire, plus torchée que jamais. La joyeuse surprise de cette matinée-là, ce fut la vue horripilante de mon ex jolie robe à présent sous l’état de guenille, non pire, des vieux lambeaux bleuâtres tâchés de chlorophylle. Je commence à me relever, mais la migraine m’assomme et je ramasse ma carcasse sous les draps en grognant bruyamment. Erika n’est plus là, sûrement partie déjeuner, ça va gueuler quand elle va voir ce que j’ai fait de mes fringues la nuit dernière… D’ailleurs qu’est-ce que j’ai fait la nuit dernière ?
    J’étire mon bras tartiné d’égratignures jusqu’à ma table de nuit, y cherche du bout des doigts un semblant de pavé froid, et attrape mollement ce que ma mère appelle si bien « cellulaire ». Toujours fouiller les historiques de son portable pour retrouver sa mémoire perdue, règle numéro de la fêtarde novice qui ne tient pas trois verres de ponch. Ça s’annonce bien, pas de photos compromettantes, pas de déclarations d’amour bidons envoyées aux dernières années et pas d’appels aux parents au beau milieu de la nuit. Mes doigts glissent sur le clavier, oui j’ai encore un téléphone à touches, et j’ouvre, fébrile, la boîte de réception. Deux ou trois « T’es où ? » de Léo, un « ça y est, je l’ai pécho ! », et puis un numéro non enregistré.

    Il ne m’a pas fallu plus de dix secondes pour savoir que c’était toi, encore moins pour me rappeler de tout. Je rigole un peu, balance mon téléphone sur le parquet et me retourne dans mes draps.

    Tu ne me voyais pas, mais quand je me suis rendormie, emmitouflée dans mes couvertures, enfouie dans mes oreillers, je souriais.



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